Le covoiturage dans l'Arc jurassien

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Cyclistes frontaliers
10 mars 2022

Cyclistes frontaliers

Mobilité

La belle échappée de quatre cyclistes frontaliers

Qu’il vente ou qu’il neige, ils traversent la frontière à vélo, électrique ou pas, pour aller travailler. L’un d’eux dit même aller deux fois plus vite qu’en voiture.

Ils ont entre 43 et 58 ans, habitent Villers-le-Lac et sont tous employés dans des manufactures horlogères en Suisse. Pour réduire leur impact écologique, ils ont trouvé encore mieux que le covoiturage.

Chaque jour, été comme hiver, ils enfourchent leur vélo à l’heure où beaucoup sont encore sous la couette, pour se rendre au travail.

Les motivations de ces «vélotafeurs» varient. Ils évoquent en vrac des raisons de santé, des aspects pratiques ou encore une prise de conscience éco-philosophique.

Bon pour la planète et pour la santé

Pour faire le trajet de Villers jusqu’à La Chaux-de-Fonds, (soit 44 kilomètres aller-retour avec 800 mètres de dénivelé), Vincent compte entre 40 minutes et un peu plus d’une heure selon la météo. Certes, ils sont super-équipés, y compris de pneus cloutés. «Mais quand il neige et que la bise souffle, c’est plus long.»

Loin de lui pourtant l’idée de perdre du temps. «C’est l’inverse. Le but est de mettre à profit le temps qu’on perd dans une voiture, pour être à l’extérieur et faire du sport», souligne-t-il.

Ce micromécanicien n’avait pas vraiment le choix. «La pratique du sport est essentielle pour combattre la maladie de Lyme que j’ai contracté en 2008», explique-t-il. «Depuis 2015, j’utilise mon temps de trajet pour faire du vélo et j’ai récupéré un niveau de santé que je ne pensais plus jamais atteindre.»

Vingt minutes de moins

Vincent a entraîné dans son sillage son voisin, Denis, qui, lui, s’arrête au Locle. C’est le grand sportif de la bande. L’an passé, il a fait 4000 kilomètres en voiture contre 16 000 à vélo. Mais s’il reste en selle pour aller au travail, c’est avant tout pour des raisons pratiques. «Je n’ai pas besoin de sortir la voiture et je gagne du temps. Dans le gros du trafic pendulaire, pour faire les 12 km qui me séparent du Locle, je mets 40 minutes en voiture et 20 minutes à vélo…».

On pousse des «ah!» et des «oh!» d’admiration. Mais Hubert, le benjamin de la bande, douche vite notre enthousiasme. «Combien de temps on met! On nous pose toujours la même question. À croire que dans ce bas monde, il n’y a que le temps qui compte. Or, sans vouloir faire de physique quantique, le temps est élastique. Le but n’est pas de gagner du temps, mais de prendre l’air», rectifie-t-il.

Il y a cinq ans, ce père de famille a troqué sa voiture contre un vélo électrique, accablé par l’image que lui renvoyait son rétroviseur. «Avoir un 4x4 et être dans les bouchons, passer du point mort à la première… Au bout d’un moment, je saturais intellectuellement. Alors qu’à vélo, c’est incroyable. Les paysages sont magnifiques et tôt le matin, on croise des animaux en nombre. On arrive au boulot en superforme. Et tout le monde peut le faire!», assure-t-il. «Je n’étais pas vraiment sportif avant de m’y mettre.»

Tenues bricolées

Hubert s’est laissé convaincre par son collègue, Raymond. «Je suis le rustique de la bande!», rigole ce dernier sous sa barbe. Lui n’a qu’un vélo classique, sans moteur. Depuis huit ans, il pédale chaque jour pour rallier Villers-le-Lac à La Chaux-de-Fonds. Comptez 1h30 l’été et jusqu’à 2h30 quand il neige. « Je me lève alors à 3h30», dit-il. Ses raisons sont d’ordre philosophique. « J’essaie d’être le plus près possible de la nature. Je n’ai pas de téléphone portable, je cultive mon jardin au naturel…», illustre-t-il.

Cette simplicité se traduit jusqu’à l’habillement. Hubert et Raymond se distinguent par leurs tenues qui les font davantage ressembler à des employés de la voirie qu’à des cyclistes. «On ne cherche pas la perfection, avoir du matériel spécial, les petites chaussettes et tout et tout. On bricole ce qu’on a, on évite d’être dans la consommation.»

Raymond aussi l’assure, c’est à la portée de tout le monde. «Regardez-moi! Je suis plutôt grassouillet. Il suffit de se lever et se coucher un peu plus tôt. Et on évite du même coup de se faire polluer par la télé!»

Une belle échappée qui pourrait même inspirer des Suisses…

Source: arcinfo, photo: Christian Galley